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Daniel Bourrion, 19 francs et une histoire (au moins)

mercredi 25 avril 2012, par sebmenard

Donc j’ai juste dit au libraire pas moustachu mais avec des lunettes rondes et une tellement bonne bouille : « J’ai vingt francs, vous avez un livre pour moi ? »

Dans mon iPod il y a une note après ce paragraphe - impossible de la comprendre aujourd’hui - « mettre les mots » - note tapée dans le train le vendredi 30 mars 2012 - incapable de comprendre exactement aujourd’hui pourquoi.

19 francs - c’est une histoire très simple (mais seulement en apparence) et très belle - y résonne dedans quelque chose d’une franchise et d’une authenticité assez fortes - et ce qui interpelle à la lecture de Daniel Bourrion - c’est cette façon de prendre la phrase ou mieux - le mot et de creuser - ça commence avec cette ville, W* - dont on cause deux fois au premier chapitre - et le second chapitre de commencer

Donc, j’habitais alors à W*, un peu à l’écart de la ville.

Donc - ça cause de ça - c’est du passé - et c’est d’où vient celui qui parle/écrit - on dirait qu’il y a quelque chose d’une légère naïveté - mais non : c’est plutôt dire ce qui doit être dit - voir ici à propos des ouvriers des hauts-fourneaux (et noter encore cette façon d’étirer la phrase) :

(...) (les mecs, eux, la plupart doivent être morts maintenant parce qu’à cuire comme ça toute ta vie, tu vas pas loin, tout le monde le sait ici même si personne n’en parle jamais, je ne sais pas, ce doit être pudeur d’ouvriers).

Donc c’est l’histoire d’un type qui achète un livre à 19 francs et qui lit ce livre :

W* et l’appart n’étaient pas loin, mais assez pour que j’ai eu le temps, cette fois-là, de lire ce livre à 19 francs.

Hommage à l’auteur donc - clairement - et pas seulement - puisque c’est l’occasion pour la langue de se lâcher tout à fait :

(...) des fois c’était un peu la jungle quand même et je te parle même pas de la fois (ah ben si, tiens, je vais te raconter) où un berger allemand - le chien, hein - avait fait une crise cardiaque (...)

On croit que ça avance très lentement - mais en réalité ça procède par très petites touches - et on s’en prend plein à la fois - pour qui lit Daniel Bourrion sur son blog on reconnaîtra cette langue qui creuse et s’étire :

sans doute que j’ai relu une deuxième fois les vingt-quatre pages du petit livre debout dans ma cuisine (...)


Et la cuisine sera l’occasion d’avancer dans les mots.

Donc c’est l’histoire d’un type qui a lu un livre - il était pas cher - mais c’est surtout l’histoire d’un type terriblement fondu de livre - même s’il a vendu « 99,99% » de ses livres avant déménagement - c’est l’histoire d’un type qui dit (et ceux qui le suivent sur Twitter ou sur ses blogs au fil du temps ne seront pas surpris) :

(...) et je passe sous silence le web où je vis maintenant, c’est le plus grand des livres et ça pèse rien ou presque (quelque part sur le web, on trouve le poids du web - enfin, des articles d’aucuns qui ont cherché combien pèse le web et qui te démontrent avec force calculs et équations grandement savantes que ça pèse lourd, certainement beaucoup moins qu’un chien crevé).

Tenter de résister ici à ne pas recopier les derniers mots de ce court texte - qui pourtant sont essentiels - et nous rappellent la valeurs des histoires comme celle-ci.

A souligner : Daniel Bourrion explique lui même

Ce texte est né d’un échange sur les librairies et notre mémoire des librairies, sur le site Tiers Livre.

Garder tout cela comme trace - maintenant et plus tard.

Et donc après 19 francs - il sera impossible de ne pas lire L’Occupation des sols - Jean Echenoz.

2Boîte Noire |2

Livre lu sur l’iPod dans le train Drăgăneşti-Olt / Bucureşti.

Images : prises à l’iPod tout en lisant dans le train - plaines du sud de la Roumanie.

Voir aussi la présentation de l’éditeur pour plus de détail.

Il faut absolument lire Daniel Bourrion régulièrement sur son blog - à suivre aussi sur Twitter.

Précision (d’importance) : c’est lorsque j’étais étudiant à Angers que j’ai pu découvrir - via la bibliothèque universitaire - la lecture numérique - souvenir de l’expérience de prêt de liseuses - y’avait des Sony PRS et des Bookeen - première exploration de publie.net - coopérative à laquelle nous sommes maintenant abonnés - donc large merci - aussi pour les fois ou d’un coup de mail on lui annonce que l’accès streaming à publie.net via le site de la BU ne fonctionne pas et quelques minutes après on a la réponse et l’accès dans le même temps).