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journal permanent | 13 juillet 2021

mardi 13 juillet 2021, par sebmenard

6h00
13 juillet

gros de pluie
épaisse

ciel gris
plein
bas
chargé

les gouttes à verse
sur les vitres

gros silence

au loin
la pluie fait comme
une brume
grise sur le fleuve
(j’aime voir les arbres
se perdre dans toute
cette flotte)

j’écoute le bon gros silence
je laisse
le brouhaha
dans le loin

je pene aux mots
de Judith Butler

je pense
à ceux de Philippe Aigrain

je respire plein
je respire bonne grosse respire

ça
tient


avec Qui — c’est aussi au sujet du travail — bon, ça : ces éclats de langues, ces morceaux éclatés du monde, tout ça là, saillant et que tu portes finalement, tu en fais quoi ? (un homme aujourd’hui m’a dit pour les câbles électriques dans un cachot en Syrie).

(relire, Prison, François Bon)
(dans la vidéo en ligne au sujet du livre, je note :

 « tu représentes la part objective du langage »
« tu reçois un texte comme ça
c’est ton devoir d’aller là et te dire
ce que désigne cette phrase
c’est ton devoir d’aller
 »


Manganelli : Bruits ou voix, Angoisses de style.


soir

j’étends du linge

oiseaux des dizaines
dans le petit jardin
leur cri

ça

si je prends ça là
le monde est beau
le monde piaille-jacte
doux

(mais je rumine en même temps)
(je rumine, je rumine, mais quoi ?)


maintenant que les jours s’effacent
je graphie lentement
les lettres — la poésie
je ne sais toujours pas
ce que c’est
au juste
mais j’y vais je fonce
avec ce bazar
ordinaire la vie — j’écoute
Lionel Suarez
son accordéon la trompette
d’Airelle Besson
dans un étrange mouvement
de silence je rumine
mon entonnoir à mots
la vie c’est ça
la vie ça te
et puis ça te
mais d’autresfois
on n’a pas les mots
même si tu sais le langage
nous réunit et nous fait
trembler tu sais
un homme aujourd’hui m’a dit
tous ces câbles
là que tu branches
ça me fait penser
j’ai tout dans la tête
deux mois et demi
de prison en Syrie
et comme ça il mime le geste
de fouetter l’air
tout autour de lui
mais ce n’est pas l’air
tout autour de lui
qu’il fouette
c’est tout lui
et son souvenir de lui
dans une prison de Syrie
deux mois et demi
là bas tu sais
parfois
c’est tout là dans tête
ou comme d’autres fois
ils branchent à la prise

et tu sais ce que c’est toi
un homme qui te le mime
devant sa voisine
juste à côté
elle se marre
et lui aussi il se marre
elle dit
les câbles fouetter fouetter
comme en Syrie

elle se marre
une dizaine d’opérations
pour se faire refaire
le ventre
et les jambes
et les pieds
un mari
mort là-bas
elle porte ça
cette fmme
et ils rient
tous les deux
ce que
je ne peux comprendre je le
dépose


soir
seul

fils endormi
cuit

buvant tisane
écoutant
two wooden spoon
(this is the kit)

j’essaie là
de tenir quelque chose
la vie
peut-être