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journal permanent | 21 avril 2018

samedi 21 avril 2018, par sebmenard

Manger de la terre est ce mot-clé choisi pour une nouvelle piste — peut-être simplement une nouvelle façon de classer (penser !) les notes, l’écriture, ce bazar — recopier donc Lucian Blaga :

 « Je prends ici la liberté d’évoquer une conversation entre enfants — telle qu’elle a eu lieu, et non pour agrémenter mon propos par une broderie littéraire. Je la transcris telle qu’elle reste gravée sur le disque de cire de la partie la plus fidèle de ma mémoire. Je n’avais pas plus septs ans. Nous étions cinq garçons, tous à peu près du même âge ; nous nous tenions en cercle, calmes, au milieu de la route, à la nuit tombante. Je ne sais plus à quel propos il est arrivé que l’un d’entre nous pose cette question : « Comment ça sera quand on est mort ? L’un d’entre nous, comme illuminé, a répondu sans hésiter : « Être mort, c’est comme quand on est vivant, de sorte que tu ne sais pas si tu es mort. Nous, par exemple, nous sommes ici, en cercler, à parler, mais peut-être que nous sommes morts, seulement nous ne nous en rendons pas compte. »

Encore une fois, c’est exactement ainsi que la scène s’est déroulée. Je ne l’ai parée d’aucun détail imaginaire. Je me souviens parfaitement de frissons éprouvé, face à la perspective vertigineuse ouverte par la réponse de ce garçon. C’est ce frémissement-là que l’on éprouve dans l’enfance, comme plus tard, lorsqu’on circule aux confins de l’ultime frontière. »

Lucian Blaga (p. 19 de la traduction française —Jean Radulesco — de Éloge du village roumain)


Dans le garage l’abri ai descendu avec moi Lucian Blaga, Patrick Leigh Fermor, André Bucher, Kenneth Goldsmith c’est beaucoup plus que tout ce que je pourrais lire ce matin (mais la seule présence des livres…) je révise la litanie de l’ours pieds dans poussière.


La question de parler des choses affreuses, ou des choses belles. Et comment ?