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Des lieux sûrs

lundi 29 février 2016, par sebmenard

Bien sûr Des lieux sûrs est le titre d’un livre de Jean-Pascal Dubost. Bien sûr il n’y a — a priori — aucun rapport entre les mots de Jean-Pascal Dubost et cette histoire de studio mobile de création. Encore que. Des lieux sûrs est un beau titre. Lui prendre pour quelques mots.1

En route — trouver des lieux sûrs. Peut-être une nuit : où dormir. des lieux sûrs pour s’endormir au calme (cette bête qui crie comme pleure un enfant — c’est un renard — celle-ci qui fait son raffut de truie en bien plus fort — c’est un sanglier). On observe le lit d’une rivière — la pente d’une colline — on s’écarte d’un vieil arbre — on se met à l’ombre d’un autre — on s’allonge une première fois dans l’herbe — on vérifie le sol — on écarte des branches ou des épines — quelques pierres — on vérifie l’éloignement des bruits — d’une route — des machines. S’il y a un banc — un tronc d’arbre — quelques larges et plates pierres — c’est encore mieux. Où se laver aussi. Être à l’abri des yeux. Faire couler deux litres d’eau sur nos corps encore chauds — ou bien se passer un gant d’eau froide.

Peut-être sous le soleil du milieu de jour : où s’abriter — une ombre un coin au frais. Où laver quelques fringues. Où poser ses affaires pour quelques heures. Où s’allonger pour une fatigue assomée (ces jours de juillet en Europe centrale ou dans les Balkans — quand il fait plus de quarante degrés et que rien ne bouge). Des lieux sûrs où appuyer nos affaires — nos corps et nos fatigues.

C’est peut-être un repas : quoi manger — où trouver des légumes frais. Où le pain — le pain au levain. Où un yaourt. Un morceau de fromage. Quelques céréales. Où l’artisan du village. On cherche des lieux sûrs pour se nourrir. On évite le poison, un seul s.

On cherche des lieux sûrs pour bosser. Où se brancher. Où poser la machine pour quelques heures et alors écrire. Au bord d’une rivière — dans un rade — une bibliothèque — une table. Parfois des lieux calmes — parfois des lieux au frais — parfois au chaud — parfois au sec — les saisons passent. Un café-librairie. Un bar. Deux meubles l’un sur l’autre dans une chambre qu’on occupe quelques semaines : c’est un bureau. Une petite table devant un fauteuil dans une cabane qu’on occupe le temps d’une saison : assez pour écrire. La table du salon de la caravane sur une colline plus au sud : c’est encore un bureau. Le banc en bois devant le chalet de quelques jours — écrire. Assis sous la toile synthétique de la tente — le bureau de chaque instant.

Les routes et les lieux on les affonne les enchaîne et les traverse — des lieux sûrs la place de nos corps et de nos — on file comme ça — des pistes on en suit combien — des lieux on en épuise combien — et lentement nous dessinons les lieux de nos futurs.

  1. Si seulement je disposais du livre Des lieux sûrs ici et maintenant. ↩︎