journal permanent | 2 octobre 2014

Le matin je pétris du pain je renverse de la farine dans la cuisine je regarde le ciel depuis la fenêtre au Sud – le matin je conduis un peu je me dis que je suis content de ne pas conduire tous les jours pour aller au boulot je me dis que c’est bien comme ça – le matin je traverse des brumes je regarde des champs j’écoute le Diésel je touche la poche de mon pantalon je vérifie la présence d’un couteau pliable – le matin j’arrive dans une ferme j’écoute un homme parler dans la salle à manger de sa maison – un temps je me dis je devrais tout écrire là en même temps qu’il parle je devrais tout noter – j’écoute un chien marcher à côté j’écoute l’air frais s’engouffrer dans la baraque je regarde le poêle à bois je regarde les bûches – il y a l’odeur du café – j’ai toujours senti l’odeur du café ici – il y a quelques meubles et la table – il y a des papiers des chiffres sur des morceaux de papier une calculatrice – il dit :

…

J’ai l’impression que c’est ça exactement ça – je veux dire c’est horrible – c’est pas comme ça que ça marche la vie c’est pas ça la vie – ça devrait pas être ça la vie – je me demande ce qu’il pense je me demande comment il fait – je me dis c’est pas ça le monde auquel je crois ça marche pas comme ça – je me dis je vais retourner sa terre – et c’est ce que je fais – presque – on désherbe on enlève un tas d’herbes on écoute la nature – on regarde le soleil chauffer la terre on écoute les bêtes on a les mains dans les orties – je pense beaucoup à nos projets je pense à nos routes – je tends des cordeaux avec des morceaux de ficelle bleus que j’assemble entre eux – je plante plus de 150 choux des choux russes dont j’oublie le nom – comme ça dans la terre avec les mains sans même prendre un outil – comme ça pour filer un coup de main – comme ça pour réfléchir en regardant la terre.