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journal permanent | 2 avril 2013

mardi 2 avril 2013, par sebmenard

Dans son journal Fred Griot parle de la différence de ton entre le journal et le poème — garder ça quelque part — ici — dans le journal permanent :

la différence de ton, de timbre, de voix, de langue entre le journal et le poème, le livre. tenter de la cerner. peut-être.
comme si ça ne parlait pas tout à fait exactement depuis le même endroit. les deux depuis la perception sensible, mais l’un plus avec la pensée, pesée, l’autre depuis les tripes, peu domestiqué.

À propos de ponctuation — d’ailleurs c’est l’occasion d’ajouter le mot-clé ponctuation à ce carnet de note — pour mieux s’y repérer :

il y a la ponctuation blanche (espaces, retraits, paragraphes…) et la ponctuation noire (les signes typo de ponctuation « classique »). (in Michel Favriau - Quelques éléments d’une théorie de la ponctuation blanche par la poésie contemporaine - in L’information grammaticale - 2004 n° 102)

Il y a aussi ceci :

presque hâte de retourner en cabane.
là-bas, il me semble que je voulais moins.
ici je suis infecté de désirs.

Je pense avoir pareil sentiment entre notre vie dans les plaines d’Europe de l’Est et celle ici en France — là-bas sans doute que les besoins étaient tout particulièrement simples — noter au passage différence besoin désir — c’était donc : chercher la chaleur ou le frais selon la saison — prévoir le manger — faire des images — lire des images.


Bande-originale : je passe de Deep Purple à Run DMC en regardant le soleil se lever sur Loire — possible qu’on se rapproche du fleuve à l’avenir.


Liste des mots clés à ajouter ou préciser :

à écrire — numérique — ponctuation — rêve.


Pour les fantômes je sais ce qui tient à peine — c’est trop — y’a trop de mots — je vais garder les trois séries Europe de l’Est — Maroc et Syrie — c’était des lieux — et puis quelques listes essentielles — le reste — ce sera dans la fosse du site.


Dans l’extrait qui suit d’Andrzej Stasiuk (Sur la route de Babadag)— je reconnais un pays — c’est certain — bien que je ne sois jamais allé à Sfîntu Gheorghe — quelques bornes plus au Nord c’est la même chose — mais c’est surtout cette phrase finale qui remue l’ensemble — ce morceau de la génération poussière vient de là-bas.

À Sfîntu Gheorghe, près de la passerelle, il y avait un monticule de paille pourrie. Je m’étais dirigé vers un immeuble à deux étages en béton. Le rez-de-chaussée inhabité était rempli à ras bord d’ordures et plein de merde. Quelqu’un vivait au premier, car il y avait des rideaux aux fenêtres. Une chaleur suffocante stagnait au-dessus de la place vide et poussiéreuse. Le ciel avait la couleur du sable. Je voulais trouver un peu d’ombre. Devant le troquet, à l’air libre, il y avait quelques hauts arbres. Dans la petite baraque, on servait sept sortes de bière et douze de vin. Derrière des tables en bois, des hommes étaient assis. Il était presque deux heures de l’après-midi. J’avais pris une bière ciuc et m’étais assis également, car j’étais enfin parvenu à atteindre un lieu d’où l’on ne pouvait que faire demi-tour.

La couleur du ciel et le nom des bières — l’immobilité de certains éléments — les coins dégueulasses et la beauté sans nom de l’ensemble — c’est cela — l’intérieur des maisons dans ce pays c’est aussi fascination :

À la même hauteur que l’icône sur le mur, étaient rangées au bord, sur le dessus de l’armoire, des boîtes vides de parfum, de déodorant et de café occidentaux. Certainement un cadeau de son fils de Bucarest ou bien de sa fille de Constanţa m’étais-je dit, car la vieille dame, en un quart d’heure, avait eu le temps de me parler aussi de ses enfants. Cette icône et cette déchetterie occidentale étaient la seule décoration de cet intérieur austère. Je n’avais pas envie de réfléchir à la portée symbolique ni à la sémantique de ce rapprochement. Je me sentais vieux et les forces me manquaient face aux évidences. J’avais laissé mes bagages et étais parti voir la mer.