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Frottez-vous

dimanche 6 décembre 2015, par sebmenard

Frottez-vous.

On avait lancé ce truc en le reprenant de la bouche de quelqu’un d’autre. Ce que nous faisions ce jour-là : on soulevait la nuit.

Et nous répétions ces mots : frottez-vous. Il me semble que c’était une sorte de nécessité absolu : de la tendresse et des corps.

Nous fêtions peut-être l’hiver — peut-être nos rêves et le désir d’être là — ensemble.

Alors l’un d’entre nous — était-ce bien l’un d’entre nous — passait des sons depuis sa machine à passer des sons — et toute la pièce sentait la sueur — la bière — la pizza chaude — la tendresse et la surprise.

Et donc nous étions au milieu de cette salle et les corps les uns les autres les corps se frottaient — et donc très exactement frottez-vous on gueulait comme s’il s’agissait de la meilleure façon de sauver nos âmes — nos corps — nos désirs et le moment présent.

Il n’avait pas fallu longtemps pour que certains reprennent ces mots et se mettent — eux aussi — à le murmurer — à le glisser contre la joue d’un autre — à le répéter à le crier — à se frotter contre son voisin — quelqu’un qui passait là — un inconnu avec lequel il n’y avait pas d’autre solution que cette idée toute simple — chamanique et tendre — tendrement humaine et corporelle — tout à la fois spirituelle et basiquement terrestre — notre infini désir de tendresse.

Combien de temps cela avait-il pu durer ? Aucun souvenir. Mais nous nous étions réveillé plus tard — autour d’un feu au milieu d’un petit bois. Les pieds dans la boue. De grands sourires sur nos faces toujours prêtes à sourire.

Ce que notre ami passait ce soir-là depuis sa machine à passer des sons — c’était des sons de l’est — car c’est son affaire de passer des sons de l’est — et c’est la nôtre de lancer comme ça — cette idée de se frotter les uns contre les autres — tout comme de se frotter effectivement.

Finalement — il suffit de se rendre tout à l’est — il suffit de traverser un continent avec son corps — je veux dire — avec la force de son corps — pour vérifier cette idée tout simple que ce qu’il nous faut — nous les bêtes — c’est une bande d’amis avec qui pouvoir lancer ce genre d’idée dans la nuit — et s’endormir en souriant — heureux — calme et doux — comme des bêtes frottées dansées — et en faire des histoires à raconter.

Libère-toi — libère-toi — soulève tes petites barrières ordinaires.